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Rendre les médicaments pédiatriques plus acceptables : le défi du goût

Le paludisme reste aujourd’hui l’une des principales causes de décès chez les enfants dans le monde, surtout en Afrique subsaharienne.  Cette maladie est provoquée par un parasite (Plasmodium) qui est transmis à l’être humain par la piqûre d’un moustique infecté, principalement le moustique Anopheles. Lorsque ce moustique pique, il injecte le parasite dans le sang, ce qui déclenche la maladie. Chaque année, des millions d’enfants sont ainsi contaminés. Malgré les progrès réalisés dans la prévention et le traitement, un défi majeur persiste : il n’existe pas de formulation de médicament réellement adaptée aux besoins des enfants.

Parmi les traitements essentiels contre le paludisme, la primaquine occupe une place clé car elle permet à la fois de bloquer la transmission du parasite et d’assurer un traitement radical. Pourtant, aucune forme pédiatrique adaptée n’est actuellement reconnue par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Les parents et soignants sont donc contraints de couper ou d’écraser des comprimés pour adultes afin d’adapter la dose à l’âge et au poids de l’enfant. Cette pratique, en plus d’être imprécise, est risquée. Elle présente également un autre inconvénient : l’enfant est directement exposé à l’extrême amertume du médicament, en particulier de la primaquine. Or, comme le traitement est de longue durée, cette amertume entraîne progressivement un rejet, voire un refus de le prendre, compromettant son efficacité.

C’est là qu’intervient le projet DPP (Developing Paediatric Primaquine), financé par le programme européen EDTCP (European & Developing Countries Clinical Trials Partnership). Ce consortium international réunit chercheurs, cliniciens et industriels autour d’un objectif commun : concevoir une formulation pédiatrique de la primaquine, efficace, sûre… et acceptable pour les enfants.

L’EBI contribue activement à ce travail collaboratif grâce à son expertise en formulation galénique et son savoir-faire en sciences sensorielles, notamment via son panel formé à l’évaluation de l’amertume.

En optimisant des formulations associant différents édulcorants et arômes, les équipes de l’EBI, en partenariat avec l’University College of London (UCL), ont réussi à réduire l’amertume perçue de près de 50 %, tout en respectant un équilibre délicat : garantir un coût de production abordable et éviter que le goût ne devienne trop attractif afin de prévenir toute ingestion volontaire et répétée.

Deux formulations prometteuses, validées par les deux équipes, ont ensuite été testées sur le terrain en Afrique auprès d’enfants pour évaluer leur acceptabilité et leur efficacité.

Cette approche s’inscrit dans l’une des thématiques phares du Consortium de l’EUPFI (European Pediatric Formulation Initiative), où industriels et académiques, parmi lesquels l’EBI, unissent leurs compétences pour innover dans la conception des médicaments pédiatriques. L’objectif : penser le traitement non seulement en termes d’efficacité pharmacologique, mais aussi d’expérience patient, notamment les enfants. Intégrer les sciences sensorielles dans le développement pharmaceutique, c’est donner toutes les chances à un traitement d’être accepté, suivi… et donc efficace.

En rendant la primaquine « enfant-compatible », le projet DPP illustre comment la recherche collaborative peut transformer la santé mondiale et améliorer la vie des plus vulnérables.

Et vous, que pensez-vous de l’intégration des sciences sensorielles dans le développement pharmaceutique ?

Accédez aux articles :

https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2468519424002337
https://www.mdpi.com/1999-4923/15/7/1879

Vos contacts : Samar Issa, Marc Lavarde, Elodie Wallon